Arrêt de course nécessaire pour guérir une fasciite plantaire?
Il est possible qu’un coureur se demande s’il peut continuer à courir avec des douleurs au talon. D’ailleurs, il s’agit de l’une des blessures les plus communes dont souffrent les personnes actives. Étant donné que le talon est l’une des zones les plus sollicitées par les coureurs, il est inévitablement sujet à la douleur. Bien que la plupart des talalgies aient une origine mécanique, il convient de ne pas oublier que d’autres causes sont possibles. Et c’est généralement l’impact de la foulée qui déclenche la douleur à différents endroits et pour différentes raisons.
Pour bien répondre à cette question, nous abordons les facteurs qui entrent en ligne de compte afin d’y voir plus clair.
1. Identifier la cause
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- Si vous ressentez de la douleur au talon à la suite d’une fracture de fatigue ou d’une fracture à l’os du talon, il est fort probable que vous ne voudrez pas courir, car l’os du talon pourrait limiter sa vitesse de guérison et potentiellement nécessiter une intervention chirurgicale.
- Si votre douleur au talon est causée par une rupture ou une déchirure partielle du fascia plantaire, vous devrez interrompre la course pour lui laisser le temps de cicatriser puisqu’une déchirure complète pourrait se produire.
- Si votre douleur au talon est attribuable à une fasciite plantaire, il vous sera probablement possible de continuer à courir et de la traiter efficacement en apportant quelques changements à votre routine.
- Si vous êtes ambiguë quant à la cause de votre douleur, définir celle-ci est votre première étape.
2. La façon de courir et la biomécanique
Dans la grande majorité des cas, la douleur au talon est étroitement liée à votre biomécanique de course. Votre biomécanique, c’est-à-dire la façon dont votre corps bouge, est affectée par les surfaces sur lesquelles vos pieds se posent. Ainsi, les surfaces choisies peuvent avoir une incidence importante sur le développement et le traitement de votre douleur au talon.
Dans un cas de fasciite plantaire,
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- Une diminution de l’amplitude de vos enjambées est souhaitable
- Une augmentation de la cadence de course
- Déplacement de centre de gravité vers l’avant
- Ces changements auront pour effet de diminuer la quantité de stress, tension trop élevée, sur vos talons.
- De plus, segmenter les courses à raison de 15 minutes. Il préférable de faire 15 min le matin et de courir à nouveau 15 minutes le soir, plutôt que 30 minutes en une seule course.
- Finalement, l’alternance entre la marche et la course à raison de 1:1 (exemple : 2 minutes de course suivi de 2 minutes de marche) est un excellent moyen d’être actif et de tout de même diminuer vos douleurs. Cette technique nécessite un temps d’adaptation plus grand et est subjective à chacun d’entre vous. Vous aurez trouvé cet « équilibre » lorsque, le lendemain matin de vos courses, vos douleurs auront drastiquement diminuées.

3. La pronation
La pronation, le mouvement qui irrite le fascia plantaire lésé, a également son importance. La pronation est la façon dont votre corps s’adapte aux surfaces inégales et absorbe la force de gravité lorsque vous marchez et courez. Lors de celle-ci, le pied se déplace dans trois directions :
- Dorsiflexion (mouvement du pied qui s’éloigne du sol vers l’avant du tibia);
Le plus grand stress sur le fascia plantaire se produit au moment où vous courez vers le haut d’une colline abrupte, votre genou est poussé plus en avant que le pied, votre talon remonte du sol et le gros orteil est forcé de se fléchir. Ce mouvement resserre le fascia à sa tension maximale. Lorsque cette tension particulière sur le fascia plantaire s’ajoute à la force de propulsion de tout le poids de votre corps vers le haut de la pente, la tension peut étirer le fascia plantaire jusqu’au point de rupture.
- Éversion, et;
Le prochain mouvement à considérer est l’inclinaison latérale du pied qui s’adapte au terrain en pente. Si vous vous tenez sur le flanc d’une colline et faites face à la pente (sans faire face à la montée ou à la descente), votre pied en montée se prononcera et votre pied en descente supinera. La différence est la direction d’inclinaison des os du talon. Les termes médicaux ou biomécaniques pour l’inclinaison interne et externe des os du talon sont « inversion calcanéenne » et « éversion calcanéenne ».
Debout face à la pente, le pied descendant est inversé. La cheville roule vers l’extérieur, l’os du talon s’incline vers l’intérieur, avec la base de l’os du talon vers la ligne médiane. Le pied est en supination, ce qui diminue la tension sur le fascia plantaire. Le pied en montée est renversé. La cheville s’incline vers l’intérieur, l’os du talon s’incline vers l’extérieur, la base de l’os du talon étant éloignée de la ligne médiane. Le pied descendant est prononcé, ce qui augmente la tension sur le fascia plantaire.
- Abduction.
La dernière des trois forces liées à la pronation est l’abduction. Il s’agit d’une rotation du pied vers l’extérieur par rapport à la jambe. La plupart des humains ne le font que lors de la pronation. L’abduction est également plus prononcée lorsqu’une force de rotation est appliquée. Cela se produit généralement lorsqu’on change de direction et qu’on pousse vers l’extérieur.
4. Surfaces de course à éviter
Donc, chacune de ces trois directions de mouvement étire le fascia plantaire. Évitez de courir sur des surfaces :
- En pente, donc de montée et descente
- Irrégulières, c’est-à-dire dans la forêt, sentiers inégaux ou rocailleux
- Très dures, comme du bitume ou de l’asphalte
- Glissantes, comme des chaussées glacées.
Il reste quoi, une surface terreuse ou gazonnée, plate et sans obstacle. Il s’agit là d’un idéal à prioriser, mais qui n’est pas toujours possible.
5. Déterminer vos objectifs de course
Si vous courez occasionnellement pour le plaisir, vous pourrez continuer la pratique de ce sport avec une blessure sans conséquences à long terme. Toutefois, dans d’autres cas, le fait de poursuivre les exercices de course tout en tentant de guérir peut créer un risque de lésions tissulaires permanentes, une chronicité, ce qui peut entraîner des problèmes de pieds récurrents et permanents. En cas de problèmes récurrents, vous pourriez être incapable de vous adonner à la course.
La plupart des coureurs sont des êtres routiniers. Jour après jour, nous parcourons les mêmes itinéraires, du même côté de la route, dans la même direction, pour la distance qui correspond à notre programme d’entraînement. Savoir ce qui aide ou blesse le fascia plantaire dans votre routine peut faire la différence entre courir et boiter. Alors, il vaut mieux déterminer quels sont vos objectifs de course et ajuster votre programme d’entraînement en fonction de la guérison de votre blessure au talon.
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- Écoutez-vous ! Votre corps et vos douleurs sont votre meilleur indicateur : une douleur matinale plus élevée ou stable est négatif, tandis qu’une douleur diminuée est le signe que vous êtes sur la bonne voie.
6. L’importance du soulier
Les types de chaussures utilisées peuvent également vous exposer à un risque plus ou moins grand de développer une douleur au talon. Il va de soi que vos chaussures sont adaptées à votre biomécanique spécifique de la course à pied. Une transition progressive vers ce type de chaussures décrit ci-dessous fait partie d’un plan de traitement complet.

Mes recommandations dans un cas de fasciite plantaire :
- Soulier de type « stability motion »
- Une diminution de la flexibilité de la semelle, plus rigide et moins permissive
- Une élévation au talon, communément appelé un drop, d’au moins 10 mm
- Un soulier ayant un indice minimaliste plus bas de < 50%.
N.B : Il s’agit ici de recommandations professionnelles personnelles, et ne s’applique en aucun cas aux coureurs asymptomatiques (n’ayant pas de douleur au talon). L’objectif ici est de diminuer les tensions sur les talons lors de l’activité. Une fois la guérison complète et un programme de renforcement effectué, le retour au soulier de prédilection du coureur est envisageable de manière progressive.
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Dr. Antonin Bérubé, votre podiatre
Diplômé du programme de doctorat en médecine podiatrique (DPM) de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Il est professionnel de pathologies du pied et la de cheville. Sa passion pour la biomécanique et les douleurs musculo-squelettiques l’amène à traiter chaque patient comme un athlète, de façon à le remettre sur pied le plus rapidement possible et à prévenir de futures blessures.